Qui a deux maisons perd sa raison

La France ramenera-t-elle le trophée à la maison? Après 20 ans, le peuple piaffe et demande son dû. À quoi cela sert-il d'être une grande nation dont l'objectif est make the planet great again, en évitant au passage de faire débarquer sur ses côtes des gêneurs nageurs, si ce n'est pour ne même pas montrer qu'on peut gagner la coupe du monde?

Mais, si la fébrilité est palpable dans les médias, la route des Bragades est plutôt calme samedi 14 juillet. Ses résidents se préparent-ils patiemment à célébrer les doubles festivités de la prise de la Bastille et de la coupe du monde? L'hypothèse est plausible.

En ce matin de Fête nationale, le départ est un peu laborieux, car il faut préalablement charger l'Espace de moult caisses contenant livres, DVDs, et CDs expulsés de leur résidence principale pour cause d'inutilité et encombrement excessif. Ils ont tout de même la chance relative d'avoir échappé à la déchèterie où ont péri nombre d'eux pour leur laideur, vieillesse ou mauvais goût. Grâce à ce bel auto-dafé, les bibliothèques sont devenues très sobres et leurs occupants affichent fièrement sur leur dos des titres comme La magie du rangement, L'art zen d'entretien de la maison, Pourquoi lire quand on peut vivre? et autres Lili est désordre ou Max n'aime pas lire. Ah oui, Das Boot ist voll dans l'appartement de la rue Dassier soumis à rude épreuve avec une opération Desert Storm de N. G a dû ruser tel Schindler face à l'échafaud pour sauver du couperet le livre éponyme, son coquin Beating the Sicilian (fesser la Sicilienne) et l'intégrale des oeuvres de Paulo Coehlo.

Aussi, la première tâche aux Bragades consiste-t-elle à trouver un logement pour tous ces réfugiés. Les caisses sont péniblement hissées dans la grange de la dépendance après que la paille en eut été déplacée d'un coin stratégique, à savoir suffisamment reculé pour ne pas attirer le regard des voleurs de livres, mais assez proche pour décourager leur anéantissement par les nombreux rongeurs, hôtes des lieux, encore qu'il s'agisse là surtout d'un voeu pieu.

L'objectif de la journée consiste à préparer le vestibule pour qu'il puisse être repeint. N place patiemment des bandes de papier et de scotch sur les boiseries tandis que G ponce le plâtre avec d'amples et élégants mouvements Pilate. Certaines vis dépassent alors il faut les enfoncer à la visseuse, ce qui forme un trou dans le plâtre.

Le déjeuner est frugal mais toujours agréable à l'ombre du pin du jardin, où l'on en profite également pour arroser la vigne.

L'après-midi reprend dans la chaleur moite de l'été, à peine ponctuée d'algarades de routine, où le G-splaining rivalise de bonne foi contre le sournois N-spreading.

Après avoir tout poncé, G forme un petit pot de plâtre qu'il repasse sur les creux et les rainures qui ne sont pas partis avec le ponçage. N quant à elle continue son oeuvre d'emballement et recouvrement des boiseries exposées.

G décide ensuite de passer un joint d'acrylique au pistolet dans les interstices entre les placos. Il découpe un tube d'acrylique et se rend compte que le couteau est taché de ciment, dont quelques miettes finissent dans l'orifice nouvellement créé. Lorsqu'il commence son colmatage, il a l'impression désagréable que l'acrylique est grumeleux. Il attribue cette consistance aux miettes de ciment qui ont peut-être causé une réaction chimique dans le tube. Mais les grumeaux persistent bien au-delà de la moitié du tube et obstruent même le passage dans la buse. Il se dit que l'amalgame a souffert de la chaleur et décide de tenter le coup avec le second tube qu'il coupe avec un couteau propre. Mais les grumeaux continuent de sortir et rendent le lissage impossible. Ce n'est qu'après avoir vidé les deux tubes, qu'il se rend compte que l'acrylique est expressément conçu pour colmater les brèches dans des murs rêches et non pour la finition sur placo...

La journée est bien avancée et il n'y a pas le temps pour passer une première couche de dispersion. Celle-ci est reportée au grand bonheur de N, pour qui la priorité reste d'aérer leur demeure principale!

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